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Q.I. or not Q.I. ? L’identification du surdon (8/ 12) – Différences intra-individuelles : Hétérogénéité des profils HP dans le QI

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Ce billet est le 8° d’une série sur les limites des tests de QI pour les personnes dites « surdouées » (ou Haut Potentiel Intellectuel / HPI, Haut Quotient Intellectuel / HQI) rédigée par Stéphanie Aubertin – Neuropsychologue chez I-Cog, structure aixoise spécialisée dans le handicap cognitif.

Il est temps de regarder de plus près le profil des personnes surdouées car l’on croit souvent à tort que ces personnes réussissent de manière significative tous les tests et leurs subtests.
Or, il existe de nombreuses différences, que celles-ci soient intra-individuelles (thème de ce billet) ou inter-individuelles (thème du prochain billet).

1. Dyssynchonie

Terrassier (1981) a mis en exergue le décalage que l’on observe chez les enfants précoces entre la rapidité du développement de leur intelligence, et le développement normal des capacités psychomotrices et socio-affectives. Ce décalage crée un contraste que Terrassier a nommé dyssynchronie. Selon cet auteur, il existe deux types de dyssynchronies : la dyssynchronie interne et la dyssynchronie externe.

La dyssynchronie interne concerne à son tour 2 aspects : le premier aspect affecte le couple intelligence/psychomotricité tandis que le second aspect touche la sphère intelligence/affectivité.
La dyssynchronie intelligence/psychomotricité se traduit par des crispations musculaires, une hypertonie au niveau de la motricité fine, notamment dans les activités d’écriture car la main ne va pas aussi vite que la pensée. Cette difficulté amène souvent l’enfant à réaliser des fautes car toute son attention est focalisée sur la tâche d’écriture au détriment de la grammaire.
La dyssynchronie intelligence/affectivité, quant à elle, laisse penser que l’enfant est immature au vu de ses réactions qui contrastent avec son intelligence. En fait,  l’enfant est sensible aux événements explicites mais aussi aux non-dits comme à ses interrogations sur le monde, ce qui le rend sujet aux anticipations anxieuses et aux débordements affectifs (débordements affectifs qui sont d’ailleurs normaux pour son âge).

La dyssynchronie externe ou sociale concerne le décalage dont souffrent les enfants mais aussi les adultes dans leurs rapports aux autres. Il s’agit d’abord d’une différence dans les intérêts avec autrui, puis d’un décalage entre les besoins éducatifs du jeune et ce que propose l’école, enfin chez les adultes, cette différence d’exigence et d’épanouissement dans la vie professionnelle.

Revenons maintenant au fameux test de QI et analysons les résultats des personnes à Haut Potentiel à ce test. En effet, et contrairement à ce que l’on peut croire, les personnes surdouées ne « performent » pas à tous les subtests du WISC ou de la WAIS et un certain profil type bien caractéristique se dessine.

2. Différences entre les indices

Silver & Clampit (1990) ont comparé à partir du WISC-R la fréquence d’observation d’écarts significatifs (ie. plus de 12 points d’écart entre les QI verbal et performance) au sein d’un échantillon de plus de 2.200 enfants américains.
Ils ont observé chez les enfants précoces (QIT > 130) une fréquence d’écarts 4 fois plus élevée entre les QI verbal et performance que chez les enfants dont le QI est moyen.
Cette fréquence était même jusqu’à 5 fois plus élevée chez les enfants dont le QI était supérieur à 140.
Les auteurs en concluent que la différence intra-individuelle n’est pas rare chez les personnes Haut Potentiel et qu’elle ne doit pas être considérée comme provenant d’un trouble cognitif.

Hollinger & Kosek (1986) précisent que pour 34% des enfants à Haut Potentiel, il existe un écart significatif entre les deux échelles du WISC-R. Dans 15% des cas, le QI verbal est supérieur au QI performance, et dans 19% des cas, le QI performance est supérieur au QI verbal.
Cependant on regrette que leur échantillon soit très faible (n = 26 enfants).

Plus récemment, deux études se sont attachées à analyser le profil psychométrique des enfants à Haut-Potentiel au WISC III, en comparaison avec celle parue dans le manuel d’interprétation du WISC III et dont le nombre de sujets reste par définition faible  (cf. la loi normale) c’est-à-dire ici n= 80.
Ces deux études sont celle de Bessou et al. (2005) dont le nombre de sujets est 245, et celle de Morin (2011) dont le nombre de sujets est 273.
Concernant cette dernière étude, et contrairement aux autres études, les critères d’inclusion ne correspondent pas à un seuil de QIT 130, ni de QIT 125 comme le suggère Terrassier, mais un seuil de 125 à au moins un des indices, afin, selon l’auteur « de ne pas risquer de laisser de côté les enfants surdoués les plus en difficulté en raison de profils hétérogènes et de tester les différents seuils comme déterminant du surdouement».

 Q.I. or not Q.I. ? L’identification du surdon (8/ 12) –  Différences intra individuelles : Hétérogénéité des profils HP dans le QISource : Pierre Morin (acis-pm.org)

Dans chacune des 3 études, on remarque que les courbes présentent le même profil : une échelle Verbale haute au détriment de l’échelle Performance, plus faible.

L’auteur souligne qu’avec des critères d’inclusion différents (seuil à 125 à l’un des trois QI seulement), la courbe des performances présente la même forme, avec une baisse logique des valeurs. Le fait que le QIP soit plus bas – donc moins stable –  dans l’étude de Bessou alors que le seuil d’inclusion est pourtant supérieur ne signifie pas, selon l’auteur, que ces compétences sont moins efficaces chez les enfants à Haut Potentiel, mais qu’elles représentent une « fragilité d’expression des aptitudes en raison des pressions normalisatrices, notamment du milieu scolaire ».

3. Différences au niveau des subtests

Revenons un instant à l’étude de Hollinger & Kosek (1986) sur le WISC-R.
Les auteurs ont observé que pour 86,4% des enfants de l’étude, les performances à certains subtests étaient soit significativement supérieures soit significativement inférieures aux performances moyennes.
C’est ainsi qu’ils ont mis en évidence que les subtests suscitant le moins de variabilité intra-individuelle font tous appel au raisonnement, alors que les subtests dont la variabilité intra-individuelle est la plus importante font partie de l’échelle Performance et font appel à la mémoire visuelle, à la motricité fine et à l’aptitude à traiter visuellement des stimuli abstraits.

Subtests Pourcentage de sujets qui ont un score plus bas que le score moyen Pourcentage de sujets qui ont un score plus haut que le score moyen Pourcentage total
Cubes 19 27 46
Code 23 12 35
Complètement d’images 19 4 23
Assemblage d’objets 0 15 15
Arrangement d’images 4 4 8
Arithmétique 12 0 12
Vocabulaire 4 8 12
Similitudes 0 8 8
Compréhension 4 4 8
Information 12 4 16

Pourcentage de sujets dont le score est significativement plus élevé ou plus faible
que le score moyen selon les différents subtests du WISC-R (Hollinger & Kosek (1986))

Pour Kaufman (1992), cette hétérogénéité s’explique par le système de cotation basé sur l’attribution de points bonus en fonction de la vitesse de réponse. Selon lui, les enfants à Haut Potentiel seraient sous-évalués dans ces subtests, non pas en raison d’un niveau de performance moindre, mais parce que la vitesse de réponse n’est pas importante pour ces enfants, ce que suggère d’ailleurs Morin dans son étude.

Ce dernier met en évidence dans son étude comparative (Morin, 2011) l’existence d’un profil identique, caractéristique des surdoués, qui est bien différent de celui des personnes dont le QI est dans la norme (courbe grise et plate ci-dessous).
Certains subtests sont particulièrement bien réussis (Similitudes, Compréhension, Vocabulaire), alors que d’autres sont moins réussis, voire « juste » dans la norme (Arithmétique et Code).

Comparatifs subtests Q.I. or not Q.I. ? L’identification du surdon (8/ 12) –  Différences intra individuelles : Hétérogénéité des profils HP dans le QISource : Pierre Morin (acis-pm.org)

Si l’on analyse ces résultats en fonction du QIT, on observe que les courbes présentent une forme similaire du QIT 110 au QIT 160 (rappelons que le seuil fixé ici est de 125 à au moins un des trois QI – QIV, QIP ou QIT – et que dans ce cas, le QIT peut être égal à 110), seul le niveau baisse.

 Q.I. or not Q.I. ? L’identification du surdon (8/ 12) –  Différences intra individuelles : Hétérogénéité des profils HP dans le QISource : Pierre Morin (acis-pm.org)

L’auteur conclut que si cette courbe est bien significative du surdon, il y a lieu de s’interroger sur l’utilisation du seul QIT comme technique d’identification, tout comme les seuils à 130 ou à 125.
Il propose alors, pour les QIT n’atteignant pas les 130 fatidiques, d’étudier de manière plus précise le profil de la courbe des notes standard.

Le prochain billet s’attardera à décrire les différences inter-individuelles et mettra ainsi en avant l’influence de l’environnement et des stéréotypes sociaux.

Sources

Bessou, A., Montlahuc, C., Louis, J., Fourneret, P., & Revol, O. (2005). Profil psychométrique de 245 enfants intellectuellement précoces au WISC-III. A.N.A.E., 81, 23-28.

Hollinger, C.L., Kosek S., (1986) - Beyond the use of full scale IQ scores – Gifted Child Quaterly, 30 (2).

Kaufman, A.S. (1992). Evaluation of the WISC III and the WPPSI-R for gifted children. Roeper Review, 14 (3), 154-158.

Morin, P. (2011). Étude du profil psychométrique de 273 enfants surdoués.

Terrassier, J-C. (1981). Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante. Editions ESF.

Silver S.J., Clampit M.K., (1990) - WISC-R profiles of high ability children : interpretation of verbal-performance discrepancies – Gifted Child Quaterly, 34 (2).


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